An 897 - Un pape juge son prédécesseur
Étienne VI fait déterrer le cadavre de son prédécesseur, le pape Formose, plusieurs mois après l'enterrement. Il fait traîner le cadavre par les pieds devant un synode qu'il avait convoqué. Là, ayant solennellement condamné le défunt, il ordonne de lui couper 3 doigts de la main droite, puis fait jeter le cadavre dans le Tibre.
Son corps sera récupéré et re-enterré en cachette. Las, en 905, le nouveau pape, Sergius III, le fait re-déterrer. Il le fait revêtir des vêtements pontificaux et asseoir sur un trône et le fait re-juger.
Ensuite, l'on décapita le cadavre, on lui coupa encore 3 doigts, puis le re-jeta dans le Tibre. Cette fois-ci, personne ne prend la peine de récupérer et enterrer le cadavre.
C'est ce qu'on appelle le Concile cadavérique
Le cadavre desséché de l'ancien pape Formose est exhumé, son linceul est remplacé par les habits pontificaux et il est installé sur son ancien siège papal afin d'être jugé par le concile (qui est en réalité un synode) composé essentiellement d'évêques italiens. Formose est accusé de ne pas avoir tenu compte de son excommunication alors qu'il était cardinal-évêque de Porto, et d'avoir par ambition rompu le serment qu'il avait prêté de ne plus briguer de charges ecclésiastiques. Le cadavre se voit attribuer un diacre pour avocat, ce dernier répondant aux questions à sa place. Formose est ainsi jugé, condamné et dépouillé de ses insignes pontificaux, privé des doigts de la main droite qui lui avaient servi à bénir. Son élection comme pape est déclarée invalide et tous ses actes pontificaux sont annulés. Son cadavre est livré au peuple de Rome qui le jette dans le Tibre.
« Une cérémonie abominable suivit, où le mort fut dégradé, dépouillé des vêtements pontificaux auxquels collaient les chairs putréfiées, jusqu'au cilice que portait ce rude ascète ; les doigts de sa dextre [main droite] furent coupés, ces doigts indignes [selon ses juges], qui avaient béni le peuple. »
Daniel-Rops, L’Église des temps barbares, p. 572.
Formose a laissé un bon souvenir à Rome et le peuple de Rome accepte mal la fin tragique du cadavre. Des émeutes éclatent et Étienne VI est déposé. Il finira étranglé dans sa cellule en prison.