Le Sceau des Prophètes

Muhammad, Homme et Prophète (Muhammad : Sceau des prophètes)

Muhammed
Sceau des Prophètes

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La vie de Muhammad

La vie de Muhammed

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Annonce aux polythéistes d'Arabie

 

Un événement important eut lieu la même année que l'expédition de Tabûk et la négociation avec la délégation des Thaqîf : la mort de 'Abdullâh ibn Ubayy. Il tomba malade au mois de shawwâl de la neuvième année du calendrier musulman et mourut vingt jours plus tard. 'Abdullâh ibn Ubayy était le chef de file des hypocrites de Médine. Il occupait une position éminente parmi ses concitoyens, qui l'avaient d'ailleurs choisi comme roi peu avant de connaître l'islam.

Quand les habitants de Médine avaient commencé à embrasser l'islam, ils n'avaient plus éprouvé le besoin de se doter d'un chef puisqu'il était naturel que le Prophète soit le seul chef de la communauté musulmane. Au fil des années, Abdullâh ibn Ubayy avait montré qu'il ne croyait pas réellement à l'islam. Il avait conservé des liens étroits avec les tribus juives de Médine et pris parti pour eux contre le Prophète en bien des occasions.

Il avait déserté l'armée musulmane juste avant le début de la bataille d'Uhud. Il avait, à maintes reprises, exprimé son hostilité envers le Prophète et les musulmans en général. Son hypocrisie était de notoriété publique.

Mort de l'hypocrite Abdullah Ibn Ubayy

Son passé n'empêcha toutefois pas le Prophète de lui rendre visite durant sa maladie. Le Prophète était conscient que Abdullâh ibn Ubayy était mourant et il lui dit : « Je t'ai dit et répété de ne pas aimer, parmi les juifs, ceux qui nous combattent. » Abdullâh ibn Ubayy ne manifesta aucun repentir. Il répondit : « As'ad ibn Zurâra les détestait, mais quel bien cela lui a-t-il fait ? » As'ad ibn Zurâra avait été l'un des tout premiers habitants de Médine à embrasser l'islam et était mort peu après l'établissement de l'islam à Médine. Abdullâh ibn Ubayy dit ensuite au Prophète : « Messager de Dieu, ce n'est pas le moment de parler du passé. Je suis en train de mourir. Puis-je te demander d'être présent quand on me préparera pour m'enterrer ? Puis-je aussi te demander de me donner le vêtement que tu portes sur la peau afin qu'on m'en enveloppe ? Implore Dieu pour moi et demande-Lui de me pardonner ! » Le Prophète fit ce qu'il lui demandait.

Selon un autre récit, à la mort de Abdullâh ibn Ubayy, ce serait son fils Abdullâh, un bon musulman, qui serait venu demander au Prophète de donner son vêtement pour en envelopper son père. Le Prophète le fit. 'Abdullâh demanda alors au Prophète de prononcer la prière funéraire pour son père et le Prophète accepta. Comme il se levait pour aller avec 'Abdullâh prier pour le défunt, 'Umar ibn al-Khattab le retint par son vêtement et lui dit : « Messager de Dieu, vas-tu prier pour lui alors que Dieu t'a ordonné de ne pas le faire ? »

Le Prophète répondit : « Dieu m'a donné le choix quand Il a dit : "Peu importe que tu demandes à Dieu de leur pardonner ou non ! Jamais Dieu ne leur pardonnera, dusses-tu répéter ta demande soixante-dix fois." » (9.80) 'Umar insista encore, interrogeant le Prophète sur cette prière pour un hypocrite avéré qui s'était toujours montré hostile à l'islam. Il cita ce que Abdullâh ibn Ubayy avait dit à maintes reprises. Le Prophète lui dit alors : « Laisse-moi tranquille, 'Umar. Un choix m'a été donné. Si je savais qu'il serait pardonné si je priais pour lui plus de soixante-dix fois, je le ferais assurément. »

'Umar devait plus tard reconnaître qu'il était intervenu dans cette affaire d'une manière assez impertinente. Il fut cependant heureux lorsque de nouvelles révélations coraniques jugèrent que son attitude était la bonne. Dans ces révélations, Dieu ordonne au Prophète de ne jamais plus prier pour un hypocrite avéré :

« Quand l'un d'eux vient à mourir, ne célèbre jamais la prière des morts sur sa dépouille et ne te recueille jamais sur sa tombe ! » (9.84)

Abdullâh ibn Ubayy mourut alors que l'islam régnait en maître en Arabie. L'expédition de Tabûk fut la dernière entreprise du vivant du Prophète. Les Thaqîf étaient le dernier espoir pour les forces hostiles à l'islam. Quand ils furent devenus musulmans, il ne restait plus aucune possibilité pour qu'une tribu arabe organise une campagne contre l'État musulman.

Il restait encore, bien entendu, de nombreuses tribus arabes un peu partout dans la péninsule qui n'avaient pas encore pris clairement position. Aucune n'était assez puissante pour s'opposer aux musulmans. Elles devaient sans tarder exprimer leur position. Nous relaterons, dans les deux chapitres qui vont suivre, comment des délégations de différentes tribus commencèrent à affluer à Médine pour déclarer leur allégeance et leur acceptation de l'islam.

Au niveau individuel, il demeurait un grand nombre d'idolâtres au sein des tribus arabes. On ne pouvait pas s'attendre à ce que les gens changent subitement de religion parce que le chef de leur tribu l'avait ordonné. La foi reste une question individuelle. Malgré la destruction des idoles, en particulier des principales comme al-Lât et al-'Uzzâ, et quoique la Ka'ba fût désormais débarrassée de toute idole, il restait des gens en Arabie qui croyaient à l'idolâtrie. Ils conservaient leurs pratiques et leurs habitudes d'autrefois.

En outre, ceux qui embrassaient l'islam avaient besoin de temps pour apprendre leur nouvelle religion et en apprécier les valeurs morales. Il ne fallait pas s'attendre à ce qu'ils changent de mode de vie du jour au lendemain ou qu'ils apprennent l'islam en quelques jours. Le Prophète et l'armée musulmane étaient revenus de l'expédition de Tabûk au mois de ramadan. Deux mois plus tard, le Prophète envoya son plus proche compagnon, Abu Bakr, accomplir le pèlerinage et guider les pèlerins musulmans. Trois cents musulmans de Médine partirent avec Abu Bakr.

Le Prophète envoya avec lui vingt chameaux à sacrifier à La Mecque en son nom. Il désigna Najiyya ibn Jundub des Aslam pour s'occuper de ces chameaux. Abu Bakr emmena pour sa part cinq chameaux à sacrifier. Le but de ce pèlerinage était de montrer clairement la différence entre le pèlerinage islamique et celui des idolâtres. Ainsi, les idolâtres avaient coutume d'accomplir le tawâf nus. Ils considéraient leur nudité comme un signe de vénération pour la Ka'ba et disaient qu'en tournant autour de la Ka'ba nus, ils étaient sûrs de ne pas porter de vêtement entaché d'injustice.

Avis à tous les polythéistes d'Arabie

Quand Abu Bakr eut parcouru une partie de la route vers sa destination, la sourate 9 du Coran, « Le Repentir », fut révélée. Elle commence par une proclamation mettant fin à tous les traités auparavant conclus entre le Prophète et les tribus arabes, à l'exception des tribus qui étaient parfaitement fidèles aux termes de leur traité. Une période de grâce de quatre mois était annoncée. Ce message devait être transmis à toutes les tribus arabes, et tout particulièrement à celles qui étaient liées par de tels traités.

La saison du pèlerinage qui approchait était le moment approprié pour annoncer cette résiliation des traités. Le Prophète consulta ses compagnons et ils lui suggérèrent d'envoyer quelqu'un informer Abu Bakr de la nouvelle situation afin qu'il puisse la proclamer à cette occasion. Le Prophète dit : « Seul un homme de ma maison peut transmettre un tel message de ma part. » Ce choix était en effet conforme aux traditions sociales de l'époque.

Le Prophète appela son cousin Alî ibn Abî Tâlib et lui donna les instructions suivantes : « Apporte cette nouvelle révélation du début de la sourate et déclare à tous les gens le jour du sacrifice, quand ils seront rassemblés à Mina, qu'aucun négateur n'entrera au Paradis et qu'aucun négateur ne pourra accomplir le pèlerinage après cette année. Il n'est permis à personne d'accomplir le tawâf nu. Quant à ceux qui sont liés au Prophète par un pacte ou un traité, ce traité sera honoré jusqu'à son expiration. »

Alî voyagea rapidement sur la chamelle du Prophète, al-'Adbâ'. Quand il rejoignit Abu Bakr, celui-ci lui demanda s'il avait été nommé chef ou s'il le rejoignait simplement pour rester sous son commandement. Alî répondit qu'Abû Bakr restait le chef de cette expédition. Ils voyagèrent ensemble et ce fut Abu Bakr qui guida les musulmans dans l'accomplissement des rites du pèlerinage. Le choix du jour central du pèlerinage, celui du sacrifice, pour proclamer la résiliation de tous les traités conclus auparavant entre le Prophète et les idolâtres a été ordonné par Dieu au second verset de la sourate.

C'était le choix le plus naturel puisque toutes les tribus arabes seraient en principe représentées par des pèlerins qui ne manqueraient pas de transmettre à leur tribu la teneur de cette proclamation. Ainsi toute l'Arabie serait à coup sûr informée de la résiliation des traités et personne ne pourrait se prévaloir de son ignorance.

Le jour choisi, c'est-à-dire le 10 du mois de dhul-hijja, jour où tous les pèlerins sont rassemblés à Mina, 'Alî fit sa proclamation : « Ceci est une proclamation pour tous. Que tous sachent qu'aucun négateur n'entrera au Paradis. Il ne sera permis à aucun négateur d'accomplir le pèlerinage après cette saison et il n'est permis à personne d'accomplir le tawâf autour de la Ka'ba nu. Quant à ceux qui sont liés au Prophète par un pacte ou un traité, ce traité sera honoré jusqu'à son expiration. Ceux qui ne sont pas liés par un traité avec le Prophète ont quatre mois de préavis. »

Abu Bakr envoya plusieurs personnes faire une proclamation semblable dans les camps de différentes tribus afin que tous l'entendent le même jour. Cette annonce proclamait aux polythéistes d'Arabie qu'ils disposaient de quatre mois pour définir clairement leur attitude envers l'islam. Pendant cette période, tous seraient donc en sécurité. Chacun jouirait du temps nécessaire pour s'organiser et prendre ses dispositions.

En outre, ceux qui étaient liés par des traités aux musulmans et étaient fidèles aux termes de leurs traités recevaient à nouveau la confirmation que les traités seraient honorés par le Prophète et les musulmans jusqu'à la date prévue. Il n'y aurait toutefois pas de renouvellement. Cette mesure s'appliquait uniquement aux idolâtres d'Arabie. Elle aurait pour effet l'élimination totale de l'idolâtrie sur ce territoire. Quant aux idolâtres des autres parties du monde, ils pourraient coexister pacifiquement avec l'islam et l'État musulman : on leur demanderait seulement de ne pas être hostiles, de ne pas le combattre et de ne pas soutenir les puissances hostiles.

Les adeptes des autres religions révélées, comme les juifs et les chrétiens, ont quant à eux un statut différent. Ils peuvent être citoyens de l'État musulman tant qu'ils en respectent les règles et les lois. Tout acte de trahison ou d'agression à l'égard de l'islam fait l'objet d'une réaction ferme de l'État musulman. Si ces gens vivent en paix avec l'État musulman, ils obtiennent le droit d'être protégés par lui ; cette protection signifie qu'ils sont libres d'y vivre, d'y travailler et d'y pratiquer leur culte en toute sécurité.